À un clic du gangster
samedi 22 février 2025
21 février 2025
Bientôt midi devant le McDonald’s du centre commercial, cinq hommes en tenue de scooter attendent, accoudés à la rambarde autour du trou des escalators ; veste épaisse, pantalon imperméable, chaussures montantes à semelles épaisses, casque et bracelet plastique transparent pour smartphone. Ils attendent la notification, l’appairage entre un client affamé, immobile, et leur localisation, par le truchement d’une application captant 30% du prix de la course.
Pendant une guerre, toutes les horreurs sont plausibles.
Après la deuxième guerre mondiale, les partis révolutionnaires, la classe ouvrière, n’a pas réussi à transformer le "plus jamais ça" en chassant le capitalisme. Le régime s’est maintenu, sous toutes les formes possibles, entre compromis, avancées et reculades, mais grandissant toujours. Gangster ou homme d’affaire, la différence est mince, il s’agit de jouer avec les règles de la société pour son propre profit, d’appliquer sa morale avant celle de la société, c’est ce qu’on voit dans les films de mafia. Les gangsters ont gagné, les états sont voyous, de la Russie aux États-Unis, demain ici la transformation sera actée également. "Socialisme ou barbarie", telle était l’alternative pour le 21e siècle, suggérée par une vieille revue d’après-guerre, et par certains courants, ou tous les courants trotskistes, et c’était là la raison pour laquelle il fallait se battre, pour ne pas que l’humanité sombre.
D’une part, le capitalisme ne peut pas être éthique, humain, "autre". D’autre part, le pouvoir corrompt. Il faudrait être capable de puissance sans pouvoir.
La puissance est dans la poésie, le Pouvoir n’a rien que lui-même, tautologique, il est sans puissance. Il la recherche mais ne peut jamais l’atteindre, insatiable, il est prêt à tout, et grandit dans son écrasement du reste.
L’intérêt général a été massacré à coups de pioche dans le cœur.
On apprend que l’épouse même de François Bayrou travaillait dans l’établissement catholique qui pratiquait les sévices corporels, sexuels, sur les élèves. Et elle y travaillait, on lit même que leurs enfants y furent scolarisés. Et une de ses collègues dit qu’elle "entendait les coups", comme elle le racontait "il y a trente ans déjà sur Antenne 2". Et aujourd’hui, "les services de Matignon" dénoncent cette ancienne enseignante, lanceuse d’alerte, et Élisabeth Borne préfère attaquer Mediapart. Ces gens-là sont au pouvoir, sont le Pouvoir. C’est une famille qui se serre les coudes, tout au fond de l’horreur.
Je n’ai pas accès au texte en entier de Lola Lafon, on peut lire dans Libé :
L’indifférence à la souffrance des autres est érigée en politique et la place des mineurs dans notre société en est une bonne illustration : ultra-sollicités comme consommateurs et totalement ignorés dès lors qu’ils agissent, s’expriment, dénoncent.
Comme une guerre quotidienne de qui a le moindre pouvoir sur des corps.
Sur Arte, dans McMafia(titre nul, je ne sais pas encore pourquoi ça s’appelle comme ça après deux épisodes), le banquier qui avait toujours refusé les compromissions, blanchiments, arnaques, et avait coupé les liens avec les oligarques de son pays natal, devient gangster en un seul clic de souris pour venger son oncle. C’est ce moment, dans l’épisode 1, cet index suspendu qui finit par appuyer sur le bouton de la transaction.
Pas traduit Marguerite Young aujourd’hui. Si Claro pouvait accélérer le mouvement, on pourrait lire, encore mieux. Ou en anglais.