Couleur planète

4-25 juillet 2020

J’ai vu [1] une couleur qui "n’existe pas". C’est la vieille question de savoir si nous voyons tous les couleurs de la même manière. Ce qui existe c’est la façon dont le cerveau comprend les longueurs d’ondes. Or, certaines couleurs ne correspondent à aucune longueur d’onde du spectre, comme le rose, éternel absent de l’arc-en-ciel [2]. Les cônes de la rétine qui réagissent au rouge et au bleu sont sollicités, mais pas les cônes dédiés au vert, alors que le vert serait la longueur d’onde valide, "moyenne" entre les deux.

Donc le cerveau forme une autre couleur intermédiaire, et ce mélange de bleu et de rouge forme ce que l’on appelle rose.

Après avoir compris ça, j’ai vu ce qui se passe, et qui n’existe pas dans la nature a priori, quand les cônes rouges et verts sont sollicités en même temps, mais que ce n’est pas du jaune [3]. Mon cerveau n’a pas très bien su réagir, mais j’ai quand même vu quelque chose en effet d’à la fois rouge et vert, dans une teinte inédite difficile à décrire autrement que par cette tendance à être les deux à la fois. Même chose avec le bleu et le jaune. C’est à la fois étrange, et pas tellement surprenant. Et c’est ça le plus surprenant.

Il faut loucher pour superposer les deux croix blanches, et quand une seule, ou à peu près, sera visible, elle sera rouge-verdissant, ou vert-rougissant. Irisé ? Tremblant ? Comme un fruit vert qui surprend à être mur, mais reste un peu amer. Mais ai-je bien vu ce que je crois avoir vu ? Je me demande si je n’ai pas vu deux couleurs, un vert-rougissant et un rouge-verdissant, chacune dans une croix mal superposée à l’autre, qui m’ont fait la même impression (au "goût" disons) mais avec des "couleurs" différentes.

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Imaginons une planète portant la vie, éjectée de son soleil. Ses habitants auraient évolué depuis l’âge où leur planète était éclairée jusqu’à sa trajectoire dans l’obscurité. Ils se seraient habitués à sa chaleur tectonique, à sa forte activité volcanique, et à son ciel de Voie Lactée permanent. Ils auraient une excellente vision nocturne, aucune caverne ne serait sombre à leur yeux, pour eux l’ombre et l’obscurité n’existeraient pas, mais la lumière de la lave les effraieraient, de même que la lumière supposée de certains systèmes planétaires. Car en effet, ils seraient devenus d’excellents astronomes et auraient déduits avec effroi tout ce que la lumière puissante d’un petit soleil comme une naine jaune pourraient causer comme dégât à leur système visuel, leur permettant peut-être, toutefois, de voir des couleurs inconnues. Ayant calculé leur trajectoire, ils auraient découverts leur statut très particulier et rare de planète sans système, car j’imagine leur civilisation se développer dans les temps de l’ombre, après le départ, peut-être d’anciens récits oraux vieux de vingt ou deux cent mille ans garderaient trace de l’arrachement à l’attraction de leur soleil de naissance, toujours visible dans leur ciel, plus proche et plus brillante étoile de laquelle ils s’éloigneraient irrémédiablement. Ils sauraient par quelles étoiles leur planète devrait passer, comment elle ne serait pas attrapée par ces systèmes mais rebondirait dessus et comment ils devraient se protéger de la lumière et inventer des appareils d’observations adéquats pour observer sans être vus, découvrant ainsi les notions de jour et de nuit. Mais ils auraient le temps de se préparer, d’ici peut-être cinq cent mille ou un million d’années.