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D’un temps même

mercredi 6 octobre 2021

dimanche 3 octobre

Je me souviens de l’automne 2004, quand j’ai commencé le Journal Écrit sur une plate-forme de blog aujourd’hui disparue. C’était l’idée d’écrire sur l’écriture au jour le jour, l’avancement d’un texte, et donc de me considérer écrivain, en tenant un journal d’écriture. Je m’en souviens parce que l’air aujourd’hui était le même dehors : température, humidité, vent, couleur du ciel. C’est comme si c’était le même automne et la même disposition d’esprit pour moi.

En 2004 j’ai donc emprunté ou acheté des journaux d’écrivains, pour voir comment c’était fait. Le blog offrait cette possibilité, avec la visibilité qui n’est à priori pas dans le geste des anciens journaux que j’avais trouvé : Jules Renard, Virginia Woolf, Paul Léautaud. Mais il y avait Virginie Despentes, "en direct" sur la même plate-forme, et je comprenais le changement de paradigme du journal d’écrivain grâce à son geste. De fait, il y avait tout un réseau de tels journaux à l’époque, dont j’ai oublié les noms. Je me suis rappelé de ça aujourd’hui, mon regard est tombé sur le Journal de Jules Renard dans ma bibliothèque. Je l’ai relu en choisissant de ne feuilleter que les automnes, et c’est là que tout m’est revenu. 2004, c’est comme si j’avais commencé à vraiment écrire, avec cette publication du Journal Écrit. Une troisième naissance à l’écriture si je peux emprunter une telle formule cliché, après la première en 94 ou 95 quand je m’étais lancé dans dans l’écriture tête baissée, sans technique autre que l’imitation de Frank Herbert, Isaac Asimov et Stephen King, pour un space-opera en plusieurs volumes jamais abouti [1]. La deuxième naissance avec la lecture du Verbier de Michel Volkovitch et la découverte des ateliers d’écriture, et celui de Pierrette Epzstein et de la technique d’écrire. Découvrir que cela consistait surtout à réécrire, à choisir le bon mot et à le placer au bon endroit dans la phrase, à travailler le rythme en accord avec le sens, trouver une langue, prendre exemple sur les créations plutôt que sur les imitations, sur les inventeurs plutôt que sur les faiseurs, etc. Une exigence implacable au service du texte, à réinterroger pour chaque nouveau texte. Découvrir aussi des auteurs qui m’étaient jusque là totalement inconnus : Flaubert, Perec, Sarraute, Duras, Ponge, Char, Berberova,...

Alors, que signifie cet air d’automne, en 2021 identique à celui de 2004 ? Le dimanche pluvieux est un jour idéal pour ce genre de réflexion. Pas besoin d’aller plus loin, pas besoin de répondre, simplement se poser la question tandis que les gouttes frappent la vitre. On allumerait bien un feu dans la cheminée mais il ne fait pas encore assez froid, c’est ce temps-là et il faut en profiter, se laisser s’asseoir dedans, reprendre ces vieux livres, rester dans cet esprit et cette météo, ne rien faire d’autre.

*

En cas d’urgence, des pavés en libre-service.

Notes

[1Le premier volume, Terre, racontait comment un chercheur trouve un moyen de produire de l’énergie de manière infinie et sans coût, et le combat que c’est pour la privatisation de ce pouvoir, que les Etats-Unis veulent bien sûr s’accaparer, et de comment il décide avec deux autres personnages, de quitter la Terre avec sa découverte plutôt que de la laisser à des mains peu scrupuleuses ; et donc, quitter la Terre, pourquoi : dans le but de terraformer Vénus — mais est-ce que tout sera si simple ? Bien trop inspiré d’Asimov et ses "guides" éclairés de la psychohistoire !

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