Futur simple
lundi 23 novembre 2020
17 novembre 2020
Le Jour de la Marmotte, mais le 16 juin 1904 à Dublin.
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Ça ne s’organise pas "à bas bruit" (c’est la nouvelle expression à la mode) non pas silencieux, du tout, c’est en pleine face, c’est partout, ça le dit haut et fort : moins de libertés, plus de surveillance, partout, sur les télés, les radios, ça nous le hurle aux oreilles.
Le nom de : "Loi de Sécurité Globale". Il faut bien ouvrir les yeux sur ce nom.
Chaque gouvernement étend le marché de la haine et de la violence, où il s’épanouit en proposant de nouvelles lois, de nouvelles expressions aussi, une nouvelle langue, qui augmentent les possibles, repoussant un peu plus les frontières de l’abject. Le gouvernement suivant prend possession de ce nouveau territoire, y plante son drapeau, et ne peut que l’étendre à son tour, gauche, droite, ce n’est pas la question : tant que les institutions qui délimitent ce territoire ne seront pas détruites, chaque nouveau gouvernement héritera de la police, des lois iniques et racistes, ces trésors de pouvoir laissés par son prédécesseur, aussi de sa langue, il prendra ses mots et sera emporté dans ce fleuve de boue et de sang du mieux-oppresser. Aujourd’hui il semble impossible de revenir en arrière, ce serait considéré comme "faible", chaque candidat.e ne semble pouvoir communiquer qu’en faisant "mieux" que son prédécesseur, et donc mieux dans le pire. La langue de gauche n’existe plus : nationaliser, travailler moins, politique culturelle, programme commun, désarmement. Et moins encore la langue révolutionnaire : lutte de classe, grève générale, insurrection, confiscation, communes, gouvernement provisoire, assemblée constituante (celle-là ? Pas sûr [1]).
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Je me souviens du sablier de Windows 3.1.
Idée :
lancer un programme spatial littéraire. Il consisterait à lire dans l’espace, écrire dans l’espace, organiser des performances de lecture en apesanteur ou sur la surface cachée de la Lune. Établir une colonie poétique sur Mars. Une station de recherche en littérature en orbite autour de Vénus. Un ouvroir de littérature jupitérienne. Le Saturne du livre tous les 29 ans.
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Voilà, c’est fait. Nous avons vu les temps futurs et leurs nuages de poussières, particules, plastiques et les déserts gagner. Nous avons vu les forêts et les animaux disparaître sous les palmiers. Nous avons vu les océans se réchauffer, irradiés, et monter, raz-de-marée, ouragans. Nous avons vu les temps futurs aux pandémies sans traitement, les villes délabrées stockant les morts dans des fosses. Nous avons vu les écrans géants diffuser la seule vérité. La corruption. Nous avons vu les temps futurs aux drones de surveillance des polices ultra-violentes, meurtrières, les lois de Sécurité Globale. Nous avons vu la pensée devenir folle, les superstitions, l’abandon de la science. Or, nous savons les guerres à venir, civiles, de classes, les luttes à mener, le coût de résister aux forces réactionnaires. Et nous savons qu’il faudra les détruire, complètement, avec leurs institutions, et le mythe de la monnaie qu’il faudra abattre également. Nous ne le voyons pas, mais nous savons le monde de demain et comme il sera moins productif, plus rentable du tout, simplement à vivre. Nous les ignorons encore, mais nous savons les solutions qui seront trouvées pour cultiver notre jardin terrien, pour vivre sans ruiner les ressources, irriguer et récolter, écouter et accueillir. Nous savons comment il sera possible de ne plus consommer, de ne plus affamer, de ne plus exploiter. Nous savons qu’il sera possible de faire reculer les déserts et la fonte des glaces, les matraques et les prisons, nous savons que nous vivrons mieux, et que ce sera après, et qu’il faudrait commencer maintenant.
[1] Le processus le plus naturel (mais qu’est-ce que ça veut dire ?) serait : démission du gouvernement sous pression populaire, destitution du président, pas d’élection présidentielle, puis constituante.