Reprise
mardi 18 juin 2024
6 juin 2024
C’est le jour du Débarquement, le D-Day, je ne regarde pas les commémorations, les rassemblements m’insupportent, même pour la bonne cause, j’ai peur des foules, sans parler du drapeau, aujourd’hui, alors quand c’est organisé institutionnellement... Ce n’est pas que j’ai cherché à éviter, ou agi de façon à m’en éloigner, mais je ne me suis tout simplement pas intéressé à ce qu’il se passait en Normandie, qui allait s’exprimer, pour dire quoi. J’ai publié un fil sur le débarquement raté de 1942, qu’on retrouve dans RRK, et c’est tout. Dans ces célébrations, bien sûr, on ne parlera pas de ce Débarquement manqué, d’une part manqué, mais d’autre part réussi, malgré les pertes humaines, réussi en information, en intelligence, comme disent les Anglais. C’est une scène similaire à celle que j’ai découverte tardivement dans The imitation game [1], quand un personnage se rend compte qu’avec les messages tout juste décryptés d’Enigma, leur donnant la position précise des forces ennemies, son équipe pourrait sauver un bateau de plusieurs centaines de civils, "des femmes, des enfants", visé par une attaque imminente. Mais le calcul militaire, la logique implacable, exposée par Alan Turing himself, les en empêche. Sauver, serait révéler qu’ils savent les coordonnées d’un sous-marin, et donc que le code Enigma a été décrypté, les Nazis modifierait leur code : gagner une bataille mettrait en péril la guerre. C’est de ce genre de calcul, de dilemme, dont on serait préservé si la guerre n’existait pas, si la paix était possible partout, tout le temps. Non, on n’a pas parlé de calculs froids qui donnent envie de mourir sur place plutôt que de décider, on a plutôt exécuté des calculs froids [2].
Et c’est ce jour, de Débarquement à 80 ans de distance, que Sophie Meyer, l’agente littéraire que j’ai contacté, me dit qu’elle est d’accord pour suivre mon roman, qu’elle l’a aimé, lu avec plaisir, et m’indique très précisément une faiblesse qui l’a sorti de l’histoire, et dont je me doutais un peu, mais sans savoir exactement de quoi il s’agissait, ni comment y remédier. Qu’elle en soit infiniment remerciée. Là, j’ai un objectif de réécriture, quelque chose s’est éclairé, je sais quoi faire et comprends pourquoi ça ne marchait pas, le texte, même s’il pouvait plaire, avait quelque chose qui accrochait là où je voulais de la fluidité. J’ai tout l’été pour y parvenir. On verra bien ce qu’il se passe ensuite, désormais le roman est accompagné, et j’attends le moment où je pourrais dire avec un détachement très professionnel :
"Voyez avec mon agente".
[1] Réalisé par Morten Tyldum, scénario par Graham Moore, 2014. Adaptation de la biographie Alan Turing : The Enigma d’Andrew Hodges. Avec Benedict Cumberbatch et Keira Knightley.
[2] Avec Macron, qui piétine les règles pour faire campagne, et qui, on l’apprendra ensuite, avait déjà réfléchi à la dissolution.