Soutien philo
jeudi 23 janvier 2025
22 janvier 2025
Entre deux clics, parfois, un icône disparaît.
Table voisine, histoire d’une salariée menacée par son patron, écrasée par sa hiérarchie, mais "elle tient bon", "elle est forte" ; un quotidien, dans un bureau, quelque part dans la zone industrielle et commerciale, entre les étangs artificiels et les bois délimités par des grillages à panneaux rigide double fil. Comme partout. C’est : le travail.
On se demande quand Philip Pullman aura terminé le troisième livre de la Trilogie de la Poussière, est-ce Jean Esch est déjà en train de traduire, que se passe-t-il ? Je lis le tome 1 de La Passe-miroir, de Christelle Dabos. Tout cela, c’est : du travail.
J’ai oublié en quelle année j’ai vendu mon âme à Google. Je regrette d’autant plus que leur moteur de recherche ne fonctionne plus. Ni pour les sites, ni pour le mail. Tout cela ralentit : mon travail.
Dans la rue, un groupe de collégiens débat avec animation de la coupe "moderne-mulet", je ne m’attendais pas à ça. Faut-il que je cherche dans Google images ? Si seulement ça marchait.
Avec un des élèves dont je suis le travail en philosophie, on parle un peu du salut nazi du multimilliardaire nazi américain, et comme le sujet du moment dans sa classe est : "le travail" ; on écrit sur : "Le travail rend-il libre ?" On trouve une infinité de sujets sur le travail, et/ou sur la liberté, mais je n’ai jamais vu exprimé sous cette forme qui bien sûr rappelle trop directement Auschwitz [1]. On peut donc penser à l’esclavage, pour répondre, ou au contraire à un métier choisi, la marge est très, trop, grande. S’il y a, au premier abord, plus paisible, le regard sur l’autonomie permise, dans notre société, par l’acquisition d’un salaire, le fait qu’il s’agisse d’une obligation pour vivre et survivre permet de douter d’une quelconque liberté. Disons qu’il y a une liberté supérieure qui prévaut à cette liberté-la (sociale, politique, ...). Ce qui implique de penser à l’arrêt du travail, à la grève qui permet d’obtenir plus de liberté. Bref, on discute, on écrit, on va de concept en concept, car c’est la difficulté, quitter les exemples et idées paraphrasées pour s’évader d’un sujet, surtout quand celui-ci risquerait de nous voir donner raison aux nazis, d’une certaine manière, reprenant le "slogan" du camp de la mort, si l’on cherchait des moyens de répondre "Alors oui" d’un côté, et "Oui mais non", de l’autre. Cela reviendrait à définir des degrés de liberté, comme ceux d’un mécanisme en rotation, c’est-à-dire poser des barrières autour de la notion de liberté, qui s’en trouverait automatiquement réduite à néant. De pas de côté en détours, de question en reformulation, je crois bien qu’on en arrive à exprimer autre chose, plus que le sujet strict, et ça va vers la vocation, la recherche du bonheur, etc. On ouvre sur un absolu de la liberté. On pourrait partir sur autre chose, que le travail ne doit pas être une condition à la liberté, et la liberté ne devrait pas composer avec le travail, quelque chose comme ça, je ne sais pas. La philo nous soutient. Il faudrait continuer, trouver des références. Il faut prendre le temps de creuser, raturer, déployer ; sur toute la durée de l’épreuve il pourra produire et essayer sur beaucoup de brouillons.
Lire Clément Rosset sur Le Réel est son double, est assez vertigineux en ces jours où un gouvernement fasciste s’installe aux États-Unis ; rapport à l’aveuglement. Sur le site de la Maison Blanche, en lettres capitales :
ENDING ILLEGAL DISCRIMINATION AND
RESTORING MERIT-BASED OPPORTUNITY
Ceci dans le but de démanteler les programmes de diversité, d’équité et d’inclusion (DEI) au sein du gouvernement fédéral, par exemple imposer la mention d’"un des deux sexes biologiques". Les programmes DEI incluent souvent les questions d’accessibilité. La "discrimination positive" [2] ou la lutte contre la discrimination, est appelée ici "discrimination illégale", façon novlangue. On est vraiment dans du nazisme, et l’incroyable, c’est que le dire ne semble pas réel, ne semble pas sérieux, ça fait trop "point Godwin" et on passe à autre chose. À quoi ? Au pire ? On regarde loin, mais en Europe, en France, c’est le programme qui se déroule, tout est attaqué : l’égalité, la diversité, le savoir... C’est ça, regarder le double de la réalité, penser qu’il se passe autre chose que ce qu’il se passe, "se crever les yeux" pour se protéger de ce réel qu’on ne veut littéralement pas voir se dérouler à nouveau. Et ça se déroule partout, Soudan, Israël, Palestine, Ukraine... Et je ne sais pas tout.
J’ai longtemps résisté à appliquer l’étiquette fasciste à Donald J. Trump. Il a certainement montré quelques signes révélateurs. En 2016, un clip d’actualités montre l’avion de Trump roulant vers un hangar où l’attendent des partisans en liesse, m’a étrangement rappelé la campagne électorale d’Adolf Hitler en Allemagne en juillet 1932. C’était la première campagne aéroportée de l’histoire, quand l’arrivée de l’avion du Führer a électrisé la foule. Une fois le meeting commencé, à la manière d’Hitler et de Mussolini, Trump est passé maître dans l’art des échanges avec ses auditeurs ravis. Il y a eu la menace de violence physique (« enfermez-la ! »), conduisant parfois à l’expulsion forcée des perturbateurs. Les Proud Boys ont interprété de manière convaincante les Storm Troopers d’Hitler et les squadristi de Mussolini. Les casquettes MAGA ont même fourni une sorte d’uniforme. Le message « America First » et l’arrogance du leader correspondent au modèle fasciste.
Parmi les graciés par le nouveau président, figurent plusieurs leaders du mouvement d’assaut du Capitole du 6 janvier 2021. Un autre profil qui ressort de ces grâces, c’est celui du dealer, blanchisseur d’argent, cryptodealer. Par exemple, on trouve Ross Ulbricht, créateur de la plateforme de vente de drogues « Silk Road », sur le Dark Web. Il était devenu une figure emblématique pour les fans de cryptomonnaies, qui considéraient sa peine comme excessive par rapport à "la nature non-violente de ses crimes". Trump, lui, a plutôt argumenté de cette manière :
"Les ordures qui l’ont condamné étaient les mêmes dingues impliqués dans l’armement moderne du gouvernement contre moi. Ils lui ont collé deux peines de prison à vie, plus 40 années. Ridicule ! [3]". Le gars avait été arrêté en 2013 par le FBI, après avoir commis quelques imprudences, comme de laisser son nom sur un site, utiliser Stakoverflow (le site d’aide entre développeurs), et autres petites failles du genre, jusqu’à être arrêté dans une bibliothèque publique de San Francisco, se laissant distraire par les agents, ne lui laissant pas le temps de refermer son ordinateur portable où était ouvert le panneau de contrôle du site incriminé, et la visibilité d’un portefeuille de 144 000 Bitcoins. En 2013. 144 mille BTC en 2013... Ce qui valait 28 millions de dollars, déjà. Mais aujourd’hui... 14 milliards ? (à condition de pouvoir les vendre...) [4]
[1] La phrase ’Arbeit macht Frei’ surmontait une grille à l’entrée du camp de concentration et d’extermination.
[2] On a entendu un de nos ministres, Retailleau, ces jours-ci, dévoyer aussi cette expression, de manière semblable.
[3] "The scum that worked to convict him were some of the same lunatics who were involved in the modern day weaponization of government against me. He was given two life sentences, plus 40 years. Ridiculous !"
[4] Vu dans le Code Report.
Messages
1. Soutien philo, 23 janvier, 14:45, par cjeanney
« On est vraiment dans du nazisme, et l’incroyable, c’est que le dire ne semble pas réel, ne semble pas sérieux, ça fait trop "point Godwin" et on passe à autre chose. À quoi ? Au pire ? On regarde loin », c’est ça, c’est perturbant, dénoncer est vain, comme rendu illégitime ou insensé, ils sont fous et ils pointent leurs doigts tout autour d’eux en disant « c’est vous qui êtes fous » (le mot « raison » je ne sais pas où il est)